Entre schiste et granit, vignes et océan, partir à la rencontre d’une région préservée et surprenante du Portugal : Coimbra et ses traditions étudiantes, Aveiro et sa lagune, les villages historiques de la montagne, les vins du Dao, l’Art nouveau… En route pour le cœur du Portugal !
Le Portugal ? Lisbonne, la ville aux 7 collines devenue très tendance, l’historique et authentique Porto classée au Patrimoine de l’Unesco, les plages de l’Algarve, la Bacalhau pour plat et mythe national, la saudade chantée sur fond de fado… Le Portugal est tout cela, mais loin des clichés touristiques, recèle encore de nombreux autres trésors, villes, villages, paysages préservés et méconnus. De l’Atlantique à la frontière espagnole, les découvertes sont nombreuses au cœur du Portugal.
Entre lagune et littoral : océan, gloire et bacalhau
Contrée étroite bordée et tournée vers l’océan, le Portugal hérite de l’Atlantique son histoire et sa gloire. Au XVe siècle, au temps de Vasco de Gama et des grandes découvertes, de la Route des Indes à l’Afrique en passant par le Brésil, le Portugal a été le maître des mers, de l’or et du monde. C’est aussi de la mer que ce petit pays a tiré une autre de ses légendes, celle de l’épopée de la pêche à la morue, dont l’âge d’or se situe au début du XXe siècle, et dont les pêcheurs incarnaient, aux yeux de Salazar, la bravoure et l’âme téméraire des Portugais.
A Ilhavo, on renoue avec cette histoire, celle de ces pêcheurs qui partaient en campagne en Terre-Neuve, laissant leurs femmes, habillées de noir pendant leur absence, aux commandes : il parait d’ailleurs que la structure matriarcale de la société portugaise vient de là….
Entre lagune et océan, Aveiro, surnommée la Venise du Portugal est une jolie cité paisible et fleurie qui se découvre sur un de ces « moliceiro » colorés au fil des canaux. Sur la Route internationale de l’Art Nouveau, Aveiro affiche sa spécificité toute portugaise : l’ajout d’azulejos sur les façades, ainsi protégées des dégâts causés par l’air marin. A peine plus loin, arborant ses maisons aux rayures colorées tournées vers la lagune, l’ancien village de pêcheurs, Costa Nova, est devenu un lieu de villégiature prisé, qui révèle vite son autre facette : celle de sa façade océane, dont les vagues et la plage de sable fin invitent à une ballade sans but au rythme de la marée. A moins qu’on ne préfère aller chercher la vague, car cette Costa de Prata est un spot de surf très couru.
Le gai savoir à Coimbra, ville royale
Loin de l’océan, surplombant le fleuve Modego, surgit l’imposante Coimbra, la première capitale et la ville universitaire la plus ancienne du pays. Successivement peuplé par les Celtes, les Romains, les Wisigoths ou encore les Sarrasins, le site abrite aujourd’hui une cité fière et escarpée, faite de ruelles étroites et pentues, qui essaime son multiculturalisme et ses monuments emblématiques dans une douce joie de vivre.
Dans cette ville proclamée cité de la connaissance par le roi Dom Joao III qui légua la résidence royale, colossale forteresse médiévale retravaillée à la Renaissance, à l’Université Impériale qu’il créa en 1537, on vit au rythme du folklore, des concerts de rue et des fêtes étudiantes. A l’ère de l’Europe et d’Erasmus, les étudiants de Coimbra logent toujours dans les désuètes mais exceptionnelles « républiques », sortes de communautés de vie plus ou moins autogérées, créées par le Roi, encore lui, dans sa volonté d’offrir des conditions de vie décentes à la future élite de l’empire. Tout en la gardant sous contrôle !
Quelques mètres plus loin, dans l’enceinte de l’Université, les 250000 ouvrages anciens de la somptueuse bibliothèque baroque sont, eux, sous la surveillance de chauves-souris qui veillent ainsi sur le savoir et le protège des attaques des insectes…
Mais à Coimbra, on conte aussi les amours malheureuses et interdites de Don Pedro et de la belle Inês, « la Reine Morte », assassinée par le Roi mais portée sur le trône par son prince éperdu. Sur les traces de ces amours interdites, le romantique jardin Quinta de Lagrimas (la fontaine aux larmes), qui abrite camphriers, figuiers d’Australie et un séquoia planté par Wellington lors des guerres napoléoniennes, offre un havre de paix à l’écart de l’agitation de la ville.
Vignes, oliviers et montagnes
De Coimbra la joyeuse à Viseu l’austère, on parcourt la région du Dao, dont les vins réputés naissent sur des collines escarpées qui côtoient le granit. On s’attarde pour visiter le charmant village endormi de Santar, le « Saint Emilion » local, contempler les vignes, sentir le parfum des orangers.
Un peu plus loin, en s’enfonçant encore dans les terres, les « villages historiques » parsèment le paysage de leurs donjons et murailles aguerris par le temps, vestiges des templiers et des vicissitudes de frontière, mouvante en son temps, avec le voisin espagnol. Aujourd’hui, 12 de ces villages ont fait l’objet d’un programme de restauration et de revitalisation, ce qui n’empêche pas les mamies sous fichus noirs de continuer à observer d’un œil curieux mais souriant les rares visiteurs qui passent.
A Marialva, c’est presque tout un village qui s’est reconverti vers un discret tourisme de luxe, qui prend la forme d’une Casa do Côro où il fait bon séjourner à l’abri du château effondré. Sous le soleil exactement, au cœur du silence, il ne reste qu’à savourer le calme de cet endroit à part et à contempler les collines et les oliviers alentours ou à partir rejoindre Compostelle.
Carnet de route
Sur la côte :
– Dormir à l’Hôtel Moliceiro à Aveiro avec vue sur le canal
http://www.hotelmoliceiro.com
– Déjeuner au Bela-Ria à Ilhavo, chez Jorge Pinhao, cuisinier-président de la Confrérie de la morue où l’on cultive le slogan : dans la morue, tout est bon !
– Visiter le superbe et si calme cimetière Art nouveau d’Aveiro ou, dans un autre genre, le Musée dédié à la morue d’Ilhavo
http://www.museumaritimo.cm-ilhavo.pt
– Aller prendre un thé ou un verre le soir dans le superbe jardin du café du Museu Arte Nova dédié à l’Art Nouveau à Aveiro
http://www.cm-aveiro.pt
– Louer (avec équipage) un ancien chalutier de pêche à la morue, le Santa Maria Manuela construit en 1937 et restauré en 2010, pour un événement spécial ou une expédition à la voile sur les mers du monde
http://www.santamariamanuela.pt
A Coimbra :
– Dormir avec les fantômes de Pedro et Inês, à l’Hôtel Quinta das Lágrimas
http://www.quintadaslagrimas.pt
– Visiter le superbe et tout récemment rénové et agrandi Musée National Machado de Castro, installé dans l’ancien palais épiscopal, qui abrite une collection impressionnante de trésors religieux, de cryptoportiques et autres symboles de la puissance du Portugal au
cours des siècles
http://www.mnmachadodecastro-imc.pt
– Faire une pause au restaurant du musée, le Loggia, qui propose un excellent buffet à midi et une vue époustouflante sur la ville à toute heure
http://www.loggia.pt
– Se régaler des traditionnelles pâtisseries à l’œuf au Café Santa Cruz sur la grande place du 8 mai
http://www.cafesantacruz.com
– Assister au Festival das Artes (musique classique, films, gastronomie…) du 15-29 juillet 2013
http://www.festivaldasartes.com
Dans la montagne :
– Dormir à Casa do Côro, dans une maison de village en pierre restaurée ou dans un lodge écolo, pour profiter de la délicieuse table d’hôtes, de la piscine dans les oliviers et du jacuzzi-solarium avec vue sur les collines
http://www.casasdocoro.pt
– Déjeuner à Paço dos Cunhas à Santar, qui met la viande et la charcuterie à l’honneur et devrait ouvrir un hôtel de charme d’ici quelques années
http://www.daosul.com
D’après un article publié par Alexandra Foissac dans le magazine ACCENT, N°7, Juin 203