The Wild Atlantic Way
Premier épisode de la saga Irlande de cet été sur 9Skyline! Sous les embruns et le vent de l’Atlantique, expédition sur la côte sauvage irlandaise. Plein ouest et plein les yeux !
Wild Atlantic Way… Le nom à lui seul évoque les embruns océaniques, les côtes sauvages et découpées, les falaises abruptes et le vert de la terre se détachant sur le bleu horizon…
Bien trouvé et nommé, ce nom incarne la nouvelle campagne de promotion touristique de l’Office du Tourisme d’Irlande pour l’année 2014… Et tient ses promesses en termes d’oxygène et de paysages saisissants… Mais aussi, bien sûr, d’accueil chaleureux à l’irlandaise, de moutons gambadant dans les prés, de pintes de Guinness, d’Irish breakfasts savoureux et de soirées sans fin dans les pubs…
Alors prêt à partir en terre d’Irlande, plein ouest ? Embarquement immédiat pour les comtés de Clare, de Mayo, de Sligo, la belle région de la joyeuse Galway et les décors inimitables du Connemara et du Burren…
Galway
Starting point : Galway. Surnommée « ville des tribus » (14 familles régnaient sur la ville au Moyen-Age anglo-normand…) mais aussi ville étudiante et touristique, Galway respire la joie de vivre, rythmée par la marée et les festivals d’été. Galway, ses rues animées, ses façades pastel, sa rivière fougueuse, son port tranquille aux canards chamailleurs et aux curraghs échoués…
Légendes et vestiges historiques jalonnent la balade dans la jolie cité marine, à découvrir en se laissant guider par les flonflons des musiques et spectacles de rues et par l’odeur des embruns. Mais l’une de ces histoires est à connaître : celle du Claddagh Ring… Bague ornée de trois motifs, des mains symbolisant l’amitié, un cœur pour l’amour et une couronne pour la fidélité, elle se porte aujourd’hui encore et il peut parfois être utile de connaître sa signification. En effet, porté la couronne vers soi, le Claddagh Ring atteste de la vie matrimoniale de son possesseur, mais porté dans l’autre sens, couronne pointée vers la personne en face, tout est possible… Alors, ayez l’œil !
Après avoir visité le musée des fameuses Claddagh Rings ou la cathédrale, et remonté Quay Street, vous serez en tout cas convaincu que règne à Galway une certaine douceur de vivre. Surtout quand, passée la Spanish Arch, la lumière du soir illumine les maisons sagement alignées sur le port, quand un arc-en-ciel se dessine sur l’horizon et que les chiens de Galway sortent courir avec leurs maîtres vers le Nimmo’s Pier, pendant que les cygnes de la baie tentent des atterrissages en vol plané sur l’eau tranquille…
Balade romantique en Connemara
Panorama en vert et bleu. Avec quelque tâches de blanc, incarnant les fameux moutons de l’étape… Plus nombreux que les habitants humains, dit-on…
Le Connemara, auquel les Français vouent un attachement particulier à cause de la chanson d’un certain Michel sans doute, est un pays et un mythe à lui seul. Traversé de part en part par 12 montagnes, véritable colonne vertébrale de quartzite et de schiste de cette terre qui hésite entre tourbe et sable et entre terre et mer, le Connemara, paradis des randonneurs, invite à la sérénité et à une découverte à pied, pour un séjour hors du temps.
Imaginez. A l’ouest, au nord et au sud, l’océan Atlantique, qui, au rythme des vents et des marées, dicte sa loi côtière. Au centre, ces Twelwe Pins ou Twelwe Bens (Na Beanna Beola en irlandais) qui se dressent fièrement dans le ciel changeant. De part et d’autre, un paysage, façonné lors de la dernière ère glacière, de lacs, de landes et de tourbières, peuplé de pinsons et de faucons, de renards et de musaraignes, et fleuri de bruyère, de myrte des marais et d’orchidées.
Parfois, l’odeur du feu de tourbe, dont on aura croisé les noirs sillons en chemin, s’échappe d’une chaumière ou d’une maison solitaire et comme égarée sur une colline. Parfois, au bout d’une route sinueuse et improbable, on découvre une plage secrète au nom imprononçable (Glasoilean, chut ! ne le répétez pas) mais aux airs de paradis où l’on peut, en saison, faire de la plongée ou, toute l’année, admirer les couleurs du petit matin ou du crépuscule. Là, on vous parlera peut-être de Grace Kelly, née juste à côté dans le comté de Mayo ou d’Oscar Wilde qui aimait tant la région dont il décrivait « la beauté sauvage et montagneuse ».
Criques secrètes, lacs au bleu-vert profond, dans lesquels se mirent des monts verdoyants, moutons en liberté qui regardent passer le promeneur et le temps : c’est tout cela le Connemara mais, dans ce paysage humble et magnifique, surgit aussi parfois, au détour de la route, une trace d’un riche passé. Kylemore Abbey est un de ces imposants châteaux de style victorien avec ses hauts murs crénelés et ses tours fièrement dressées. Ce château, devenu abbaye bénédictine et école pour jeunes filles, fut avant tout le symbole et l’histoire d’un grand amour. Celui de Mitchell Henry qui acheta le domaine pour son épouse, Margaret Henry, charmée par cette région lors de leur lune de miel. Rien n’étant trop beau pour sa femme adorée, Mitchell, médecin, industriel et homme politique, fit construire une prestigieuse bâtisse dotée d’innovations révolutionnaires pour l’époque dont un système hydro-électrique pour éclairer le château ou un réseau de canalisations pour chauffer les verrières des serres du jardin. Car l’une des heureuses surprises d’une visite à Kylemore est la découverte du Jardin Victorien, 3 hectares et 21 serres sur le flanc sud du mont
Duchruach, le plus grand d’Irlande en son temps, ceint de murs et composé de différents écosystèmes, potager, flower garden, jardin d’agrément, serres abritant vignes et arbres exotiques… La pimpante maison du jardinier en chef et celle des ouvriers illustrent à la fois les conditions de vie de l’époque mais aussi la haute considération des propriétaires pour leurs jardiniers. Mais malgré la beauté des lieux, l’histoire finit mal : Margaret mourut à 45 ans de dysenterie et fut enterrée dans un mausolée construit par son mari en souvenir de son épouse sur les terres
de Kylemore. Cet homme, amoureux de son épouse et du Connemara auquel il apporta beaucoup, y repose également. Visité par le roi Edouard VII, racheté par le Duc et la Duchesse de Manchester, puis finalement acquis par la Communauté Bénédictine de l’ordre de Saint Benoit fuyant la Belgique lors de la 1ere Guerre Mondiale, Kylemore devint un internat pour jeunes filles de réputation internationale… jusqu’en 2010. Aujourd’hui, que l’on aime les beaux jardins endormis, les châteaux et les boiseries ou les belles histoires d’amour, le lieu se visite avec émotion et respect. Avec vue sur la rivière qui baigne les pieds du château, on imagine sur la terrasse et dans les jardins adjacents les fêtes somptueuses ou les parties de jeux de jeunes filles chaperonnées. Bribes d’histoires …
Échappée lunaire dans le Burren
Étendues de pierre à perte de vue, lumière réfléchie par ce plateau karstique, paysage de désert où même les moutons se font rares. Le décor est dressé, l’ambiance est saisissante, incitant au silence et à la contemplation. En gaélique, cette terre s’appelle An Bhoireann, « le pays pierreux », tout est dit… Géologiquement, le Burren résulte de calcaires carbonifères qui, avec le ruissellement de la pluie, forment un lapiaz de quelques 300 m2 tissés de crevasses et de fissures aux arrangements quasi-géométriques. Etrangeté pierreuse, le Burren est aussi un mystère écologique. Dans ce dédale en 3 dimensions de pierre, de terre et d’eau, un miracle végétal fait se cotoyer en ces terres âpres d’Irlande une flore à la fois méditerranéenne et alpine. Symbole du Burren, la gentiane venue des alpages pousse aux côtés de dryades et de lichens du sud, mais aussi d’orchidées. On retrouve plus d’une vingtaine d’espèces d’orchidées sur ces pierres blanches. Au printemps, le Burren couvre sa grise carapace d’auréoles rosées ou bleutées selon les floraisons et les mois : mars, avril, mai sont magiques et poétiques en Burren.
Malgré la rudesse de ce désert de pierre, les environs du Burren ont depuis très longtemps été peuplés et de nombreux vestiges signent la présence de l’homme dans ces contrées sauvages. On compte ainsi 130 dolmens sur le Burren, témoignant de l’importance de ce site pour les hommes d’alors dès le néolithique. Poulnabrone Portal Tomb impose sa stature et son histoire, vieille de 6000 ans, au promeneur qui grimpe jusqu’à ce dolmen majestueux. Un peu plus loin, le fort de pierre de Caherconnell raconte encore la vie entre le Ve et le Xe siècle dans le Burren. Ferme fortifiée en pierres sèches (cashel) particulièrement bien conservé, il permet de donner une idée de ce qu’était le quotidien des seigneurs, soldats, fermiers d’alors qui vivaient avec leurs bêtes dans ces forts circulaires, véritables villages protégées des ennemis extérieurs. Aujourd’hui le fort, préservé et ouvert à la visite, est aussi le terrain de jeu des chiens de bergers, vaches et moutons de l’éleveur d’à côté. Verrait-on cela ailleurs ?
Fantastiques Falaises de Moher
Quitter ce paysage de pierre pour suivre, de Ballyvaughan à Lisdoonvarna, la route côtière, une des plus belles au monde dit-on ! Là, un arrêt à The Burren Smokehouse s’impose aux gourmands pour goûter aux saumons et truites fumées au pub d’à côté, resté « dans son jus » et purement authentique. L’Irlande, la vraie !
Les surprises ne s’arrêtent pas là car la route mène droit aux Falaises de Moher. Vertigineuses. Saisissantes. 214 m d’à pic plongeant dans les vagues. Une série de falaises qui dessinent, vues du ciel et sur 8 kms, un trait en zig-zag sur l’océan. Au bout, un tour de signalisation, a pris la place d’un fort, Mothar, détruit pendant les guerres napoléoniennes et qui donneraient son nom au site, formé il y a 320 millions d’années. Aujourd’hui, en plus des (trop) nombreux touristes, on aperçoit ici des puffins, des guillemots, des fulmars, des mouettes tridactyles, des corbeaux celtiques, mais aussi quelques chèvres sauvages, des petits pingouins, des phoques, des dauphins et parfois même un requin pèlerin ou un Minke Whale… Protégé notamment pour ses colonies d’oiseaux, le site abrite aussi un centre touristique avec exposition, restaurant, caché dans la colline. Et pour monter encore plus haut et se donner le vertige d’une vision panoramique encore plus saisissante, il suffit de grimper dans la Tour O’Brien, où ont élus domicile un couple de faucons pélerins. De là, les falaises de Moher se détachent entre terre et mer, la baie de Galway et les îles d’Aran s’offrent au regard. Certains jours, on apercevra peut-être, selon le vent et la brume, la fameuse vague Aileens, dont la réputation court dans le monde du surf. Sport, patrimoine, histoire ancienne et plus récente, légendes du passé, paysages oniriques, nature sauvage entre terre et mer : tout est là, tout le charme et la beauté de l’Irlande sont là…